Éditions GOPE, 396 pages, 13x19 cm, 24 €, ISBN 978-29535538-3-3

dimanche 26 octobre 2014

L’authentique Hong Kong ?

« — À mon avis, il y a en fait deux Hong Kong, voire plus. Il y a la ville célèbre, internationalement reconnue, celle présentée par l’office du tourisme et réduite à la silhouette de Central vue de Tsim Sha Tsui ou depuis le Pic ; celle des taipans et du Hang Seng qui peut se vanter d’être le leader financier de l’Asie ; la cosmopolite dont les immeubles de bureaux de style occidental s’élancent vers le ciel, celle qui a la capacité de faire un jour partie du club des plus grandes villes du monde, du moins pour certaines activités économiques, et où le langage international du commerce, l’anglais, est parlé couramment.
Mais louchez juste un petit peu, ou enlevez vos lunettes, et cette Hong Kong va s’estomper et ressembler à n’importe quelle autre cité. Elle rejoindra Singapour, Los Angeles, Tokyo, Kuala Lumpur et Shanghai dans leur universalité émergente ainsi que de nombreuses autres villes similaires à l’architecture contemporaine et banale.

© anj_p

Cependant, en dessous et à l’intérieur de cette ville cosmopolite, il y a une autre ville très différente. J’aime l’appeler « Cantoville » parce que c’est l’authentique Hong Kong où le cantonais est souvent la seule langue parlée et où le style de vie est plus proche de celui d’un village que de celui d’une métropole internationale. Des centaines de milliers de Hongkongais mènent une existence plutôt encadrée dans cet espace qui est défini par sa langue, sa culture, son identité politique et sa géographie. Ces habitants de Cantoville tiennent les marchés locaux, les boutiques et les restaurants ; ils conduisent les taxis et les bus, entretiennent les rues, construisent les buildings, s’occupent des navires de service et du port à conteneurs, creusent et réparent les voies de communication qui permettent à cette ville de fonctionner. Ils naissent, grandissent, procréent et meurent non pas dans la Hong Kong internationale et cosmopolite, mais dans leur « village ». Ils pourraient à juste titre revendiquer être l’authentique Hong Kong. Beaucoup vivent dans des appartements d’à peine quarante mètres carrés, dans des gratte-ciel surpeuplés, dans des H.L.M. ou dans ces immeubles crasseux et sans ascenseur de six étages qu’on appelle « immeubles à Chinois ». Je suis persuadé que rien de tout ceci n’est nouveau pour aucun d’entre vous – d’ailleurs certains pourraient même bien venir de Cantoville. Pourtant, j’ai l’intuition que la plupart des personnes, quand elles s’interrogent sur le futur de Hong Kong après la rétrocession, font des suppositions sur le sort de la Hong Kong cosmopolite et non pas sur Cantoville. »

Extrait du chapitre 2. James A. Clapp.

© Benny Lam


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